top of page

Policier de terrain en 2025: entre Sisyphe et les Danaïdes

  • Photo du rédacteur: Ruben Ramchurn
    Ruben Ramchurn
  • 15 janv.
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 20 janv.

La question du deal de rue exaspère une grande majorité de citoyens. Elle incarne l’image d’une impunité criante accordée à des criminels qui ne contribuent ni fiscalement ni socialement à notre société, tout en occupant illégalement notre territoire. Paradoxalement, les citoyens ordinaires, eux, sont implacablement sanctionnés pour des infractions mineures : dépassement du temps de stationnement, léger excès de vitesse, ou retard involontaire dans l’achat d’un billet de train. Pendant ce temps, les dealers, notamment issus de la mafia nigériane, semblent jouir d’une liberté totale, voyageant gratuitement dans les transports publics et opérant sous les yeux de tous.


Ce constat provoque une colère légitime, mais il est crucial d’éviter les raccourcis. Le problème ne réside pas dans nos policiers de terrain, qui vivent une réalité encore plus difficile. Ils exécutent un travail exigeant et ingrat, soumis à des règles strictes de réserve. À la moindre erreur, leur hiérarchie se montre souvent impitoyable.


Un problème de justice plutôt que de lois


Contrairement à ce que certains politiciens avancent, le véritable problème n’est pas tant une question de lois inadaptées que de laxisme dans leur application par la justice. Une gestion presque "hôtelière" de notre système carcéral aggrave la situation. Lorsqu’un dealer bien connu des habitants est arrêté au Jardin Japonais et rapidement relâché sous prétexte qu’il est simple consommateur ou que les prisons sont pleines, c’est un message désastreux envoyé à la population et aux forces de l’ordre. Les policiers ont alors l’impression de pousser éternellement un rocher en haut d’une colline, comme Sisyphe.


Remettre en liberté un individu sous mandat d’expulsion sous prétexte de manque de place en prison pourrait constituer une infraction à l’article 116 de la loi sur les étrangers, passible de 12 mois de prison. Mais qui osera porter plainte contre ceux qui prennent de telles décisions ? Certainement pas les policiers de terrain, impuissants face à cette situation.


Une gestion carcérale absurde


Le canton de Vaud prévoit la construction de 70 nouvelles places de prison pour un coût de 70 millions de francs, soit un million par détenu. Ce montant astronomique dépasse largement le coût de construction d’une place en EMS, déjà considéré comme élevé. À titre de comparaison, les normes des droits de l’homme exigent un minimum de 4,4 m² par détenu. Or, le canton de Vaud vise des cellules de 12 m², trois fois plus spacieuses que le seuil requis. La priorité semble être le confort des criminels, au détriment de la sécurité publique.


Cette politique contraste avec celle de Pierre Maudet à Genève, qui avait décidé de prioriser la sécurité en incarcérant massivement les délinquants, quitte à dépasser les capacités carcérales. Bien que cette décision ait valu une condamnation par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour quelques centimètres carrés manquants, l’efficacité sur la sécurité était notable.


Des prisonniers en quête de "vacances"


Pour certains individus en situation irrégulière, la prison vaudoise représente une opportunité de passer l’hiver au chaud, avec un logement, de la nourriture, et des soins gratuits. Leurs séjours sont perçus comme une parenthèse sans souci, avant d’être relâchés ou expulsés, avec la certitude qu’ils pourront revenir sans difficulté. Ce cycle alimente la frustration des policiers de terrain, qui voient leurs efforts systématiquement anéantis.



Ne blâmez pas les policiers de terrain


Les policiers de terrain sont les premiers à subir les conséquences du laxisme judiciaire. Contraints au devoir de réserve, ils ne peuvent exprimer publiquement leur exaspération. Ils sont les héros silencieux d’un système devenu absurde, condamnés à remplir des tâches répétitives et souvent vaines, comme les Danaïdes qui devaient remplir des jarres percées.


Une solution à envisager


La ville d’Yverdon a récemment créé un "Service de la sécurité publique", plaçant à sa tête un directeur distinct du commandant de police. À l’automne 2023, la Municipalité a annoncé une plainte pénale contre les organisateurs d’apéros anti-deal. Cette plainte, attribuée à la PNV sur ordre de la Municipalité après lecture des médias, s’est finalement révélée provenir de Pascal Pittet, le directeur de la sécurité publique, sur instruction de la Municipalité, nuance essentielle. 


Cette subtilité permet à l’exécutif d’initier des poursuites judiciaires sans violer la séparation des pouvoirs. Dès lors, ce mécanisme pourrait également être utilisé pour lancer des poursuites contre les procureurs qui relâchent des dealers sous mandat d’expulsion. Même si les procédures n’aboutissent pas, leur simple existence pourrait dissuader la justice de relâcher trop facilement des criminels.


En conclusion


Je présente mes excuses à la Municipalité pour avoir critiqué la création de ce poste de directeur de la sécurité publique. Cette décision, que je percevais comme une perte de ressources, pourrait finalement s’avérer un levier efficace pour renforcer la sécurité publique. Utilisé à bon escient, cet outil pourrait permettre de lutter plus efficacement contre le laxisme judiciaire et de rendre justice aux policiers de terrain qui, jour après jour, s’investissent pour notre sécurité.


En 2025, disons tous merci à notre police. N’oublions jamais que s’ils ont choisi ce métier, c’est qu’ils étaient les premiers à croire à la justice et quand elle est imparfaite ou inégale, ils en sont les premiers frustrés. Être policier de terrain en 2025, c’est un peu être condamné au châtiment de Sisyphe ou des Danaïdes.




Comments


bottom of page